Alors qu’un déferlement d’indignation envahit les rues des grandes villes à travers le monde dans le sillage de la mort tragique de l’américain George Floyd, la jeunesse s’interroge sur le monde de demain. Est-ce que les jeunes peuvent renverser la vapeur en matière des inégalités et des injustices à l’encontre des minorités raciales? Quelle est leur vision pour la société canadienne? Pourquoi est-ce que les jeunes leaders sont un maillon essentiel de la lutte contre les injustices raciales? Karelle Sikapi ,la présidente sortante de la Fédération de la Jeunesse Franco-Ontarienne (FESFO), tente d’y répondre. Entrevue par Prasith Wijeweera
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Tout d’abord, pourriez-vous vous présenter?
Je m’appelle Karelle Sikapi et je suis en douzième année à l’école secondaire Ronald-Marion à Pickering. Je suis la présentement la présidente sortante de la Fédération de la Jeunesse Franco-Ontarienne.
Que veut dire le mot « leadership » pour vous?
Selon moi, le leadership englobe tous les efforts mis en place pour faire concrétiser des changements sociétales dans l’intérêt de sa communauté. Un bon leader peut prendre plusieurs formes et peut avoir plusieurs chapeaux, mais vise toujours à rester intègre et fidèle à ses valeurs.
En tant que jeune leader, quelle est votre vision pour la jeunesse?
Ma vision pour la jeunesse est celle-ci: une jeunesse sensibilisée aux divers enjeux sociétaux du passé et du présent. J’imagine une jeunesse engagée dans les problèmes de la société, des jeunes ouverts à apprendre sur les diverses réalités qui les entourent. Une jeunesse qui n’a pas peur de
questionner le système en place et de pousser ses limites pour se faire entendre.
Et pour la société canadienne?
J’espère que la société canadienne va finalement reconnaître le passé qui la hante autant que celui de nos voisins. Je souhaite évoluer dans une société canadienne qui réalise que beaucoup de mal a été fait à de nombreuses communautés, dont les communautés autochtones et les communautés noires. J’imagine une société prête à agir contre le racisme en tout temps dans toutes les institutions.
Pourriez-vous, s’il vous plaît partager vos réflexions sur les décès récents de Regis Korchinski-Paquet et George Floyd. Avez-vous participé à des manifestations pacifiques à Toronto contre le racisme anti-noir. Si oui pourquoi?
Ce n’est pas le premier cas de ce genre que je vois en ligne. Je sais que c’est probablement la vidéo choquante du meurtre de George Floyd qui a poussé plusieurs personnes à agir, mais ce n’est pas la première fois ni la dernière. Je me suis rendue à la manifestation au centre-ville pour
la mort de Regis Korchinski-Paquet, car c’est une cause qui m’affecte directement en tant que femme noire avec des frères et soeurs noirs qui ont tous vécu une certaine forme de racisme au courant de leur vie.
Dans votre rôle de présidente de la FESFO, avez-vous été témoin ou victime de racisme?
Malheureusement, dans des rôles qui demandent une certaine implication politique, les personnes noires, notamment les femmes noires, sont très susceptibles au racisme. Ça se présente sous plusieurs formes comme des commentaires déplacés, des attouchements aux cheveux sans
consentement, et j’en passe. En tant que personne non-blanche qui a beaucoup questionné son appartenance à la communauté franco-ontarienne, je crois qu’il y beaucoup de conversations qui doivent avoir lieu quant à la création d’espaces inclusifs pour les groupes racialisés.
On voit resurgir dans les médias internationaux des cas de racisme en pleine crise sanitaire. Comment est-ce que les jeunes y
réagissent?
Je crois qu’il y a tellement d’enjeux qui remontent à la surface présentement et certains jeunes vivent toutes ces tensions avec difficulté. Les médias sociaux sont inondés depuis quelques temps de publications illustrant la brutalité policière, les manifestations autours du monde, les vécus des
médecins et infirmières qui travaillent dans des hôpitaux et beaucoup plus. Les émotions sont présentement à vif.
Quels conseils donneriez-vous à d’autres jeunes leaders qui font parties des communautés minoritaires?
Je ne peux pas parler pour les minorités autres que celles auxquelles j’appartiens, mais je sais que présentement nous nous tâchons d’éduquer les autres et de rattraper les gens quant aux réalités que nous vivons. En ces moments, je conseillerais aux jeunes noirs d’être patients envers eux-mêmes. De se donner du temps de vivre leurs émotions. Je sais que plusieurs d’entre nous vivons beaucoup de colère présentement, et nous devons nous assurer que ce mouvement ne soit pas qu’une tendance.